Produire de la spiruline en aquaponie ?

Aujourd’hui nous vous proposons un article complet issu d’une formation d’apprentissage pour la production de spiruline. Dans la mesure où la spiruline pousse dans de l’eau salée, il faudrait voir comment on pourrait en cultiver en aquaponie avec un double circuit d’eau.

Introduction

Les installations et les techniques décrites dans ce document sont avant tout destinées à l’essai, à la démonstration, et à la formation. Elles devraient néanmoins permettre une production stable d’environ 40 grammes de spiruline sèche par jour (de quoi procurer un complément alimentaire très intéressant pour 10 à 20 enfants).

Ce document mise sur la garantie de résultats satisfaisant, cela au prix d’un certain surcoût (pompe électrique, milieux de culture  » cher « …). Il ne décrit pas les multiples variantes et adaptations possibles: une fois ce  » module  » expérimenté avec succès, on se référera à l’ouvrage de J.-P. JOURDAN qui permettra de passer à une véritable unité de production, adaptée aux conditions locales.

Les schémas se trouvent en fin d’article

1.Généralités : les facteurs essentiels

1.1. le milieu liquide (ou milieu de culture)

Il s’agit d’une solution de sels minéraux dans de l’eau. Ce liquide doit apporter à la spiruline tous les éléments chimiques qui lui sont nécessaires. Le pH du milieu de culture (c’est-à-dire son degré d’alcalinité) doit être compris entre 8.0 et 11. Il existe différentes recettes de milieu de culture pour la spiruline. Nous n’indiquerons ici que l’un des plus  » confortables « , il garanti au mieux la facilité d’une culture, même si ce n’est de loin pas le meilleur marché (recette : ch.3 et table 1).

1.2. La température

La température du liquide de culture influence directement la vitesse de croissance de la spiruline: bien qu’assez résistante au froid (jusqu’à 3-5°C au dessus de zéro), la spiruline ne commence à croître d’une manière appréciable qu’au dessus de 20°C. La vitesse de croissance est maximale vers 35-37°C. Au delà de cette température, on risque rapidement une destruction de la culture (qui survient à coup sûr après quelques heures au delà de 43- 44°C). Notez que de brusques variations de température sont néfastes.

1.3. La lumière

Un très forte lumière (plein soleil) peut être dangereuse dans les cas suivants:

  • sur une culture froide (moins de 14-15°C), surtout si brusque illumination
  • sur une culture très chaude, car échauffement supplémentaire
  • sur une culture très diluée (Secchi de plus de 6 cm, voir ch. 4.)
  • sur une culture en difficulté (suite à un accident)

Par contre, une culture en bonnes conditions de concentration et de température pourra être exposée avec profit à un maximum de lumière naturelle. On réduit volontairement la luminosité par ombrage si l’on désire freiner la croissance de la spiruline (ch.9), ou si l’on se trouve dans l’un des quatre cas précédents.

1.4. Spiruline (5)L’agitation

Il est impératif d’agiter, au moins occasionnellement (2-4 fois par jour), une culture de spiruline. On favorise ainsi une dispersion homogène de la spiruline dans le liquide, et son exposition à la lumière. Une agitation trop violente endommage la spiruline (fragments visibles au microscope) et provoque l’apparition de mousse. Certaines pompes centrifuges, ainsi que les chutes d’eau avec éclaboussures, sont spécialement néfastes. Le module proposé assure l’agitation continue de la culture par une petite pompe électrique (voir ch.2.). Pour de petits volumes de culture (moins de 100 litres), une agitation continue par injection d’air peut être réalisée au moyen d’un petit compresseur pour aquarium. Cette dernière méthode est très pratique pour la conservation d’une culture de secours (voir ch. 10).

 

2.Description du module d’apprentissage

2.1. Matériel

  • Un flacon de spiruline vivante
  • Un bassin couvert d’une surface totale de 4 m2 comprenant: 2 feuilles de polyéthylène 0.2 mm, 4 armatures en demi-cercle, trois barreaux de 4 m, des planches ou des briques pour la construction des murets.
  • Une minipompe électrique, type aquarium, 220V, 5-7 W (agitation et récolte)
  • 1’000 litres de milieu de culture (eau, engrais et sels minéraux selon recette)
  • Quelques instruments de mesure simples: un disque de Secchi (voir 4.1), du papier- pH, un thermomètre
  • Un équipement de récolte (voir fig.2, p.16)
  • Eventuellement: Un extrudeur et un séchoir à plateaux amovibles (fig.3, p.17)
  • Un petit compresseur d’air, type aquarium (env. 5W)

2.2. Montage du bassin couvert (fig.1, p.15)

On choisira un espace plat d’au moins 2m x 8m, en situation bien dégagée (ou légèrement ombrée en climat très chaud). Le bassin sera construit selon le schéma p.13, en employant des briques, des parpaings, des planches ou simplement des remblais de terre compactée pour en confectionner les murets. En présence de termites, on déposera une couche d’au moins 1 cm de cendres sous la bâche de fond; en présence de rongeurs, on posera un grillage métallique (type poulailler) sous la bâche de fond. Il est prudent (mais pas indispensable) de doubler la bâche de fond, spécialement si l’on ne dispose que de feuille plastique de moins de 0.2 mm d’épaisseur. Dans tous les cas, le fond du bassin sera soigneusement lissé avant d’y déposer la bâche.

Les armatures soutenant la couverture transparente du bassin peuvent être réalisés en fer-à- béton de 6-8 mm ou en bambou. On peut aussi adopter une forme triangulaire (en  » A « ) plutôt qu’en demi-cercle. La couverture transparente (polyéthylène agricole, anti-UV si possible) sera fixée sur trois côté par remblayage de terre ou de pierres. Un côté long sera laissé sans fixation pour permettre l’accès à la culture (en soulevant le plastique). On testera l’étanchéité du bassin en y laissant au moins 10 cm de hauteur d’eau pendant une nuit (vérifier le niveau le lendemain, puis vider le bassin).

3.Préparation du milieu de culture

L’eau utilisée doit être potable, si possible peu calcaire (moins de 100 mg de calcium par litre). Une eau légèrement salée est utilisable (jusqu’à 4-5 g/l de NaCl, supprimer alors le sel de la recette). La table 1 (p.14) donne la recette à suivre selon le volume de milieu de culture que l’on désire obtenir.

  • Attention: le nitrate d’ammoniaque, très courant, n’est pas utilisable ici !
  • Les produits placés entre parenthèses ne sont pas indispensables, au moins à court terme ou selon la qualité de l’eau utilisée. Par exemple, on ajoutera du chlorure de calcium (ou de la chaux) si l’on utilise une eau très douce (moins de 10 mg de calcium par litre). Une eau même modérément riche en sulfate (plus de 20 mg par litre) permet de se passer de sulfate de potassium, à condition que l’on utilise, comme indiqué, du nitrate de potassium (si l’on utilise le nitrate de sodium, le sulfate de potassium devient alors indispensable pour son potassium).
  • L’infusion de thé vert empêche le précipitation du fer: le développement d’une couleur violacée après l’addition de fer est normale.
  • Dissoudre le sulfate de fer dans un verre d’eau avant de l’ajouter au milieu; ajouter ensuite le sulfate de magnésium lui-aussi dissout dans un peu d’eau.
  • Ce milieu de culture peut être conservé quelques jours avant de l’utiliser, il faut dans ce cas le conserver à l’abri de la lumière.

4.Ensemencement du bassin et contrôle de la croissance

4.1. Mesure de la concentration d’une culture de spiruline

La concentration d’une culture peut être évaluée par l’intensité de sa couleur. On utilise pour cela un  » disque de Secchi « : il s’agit d’une règle graduée à l’extrémité de laquelle se trouve fixé (perpendiculairement) un petit disque blanc. On plonge cet instrument dans la culture, jusqu’au point où le disque cesse d’être visible. La profondeur du disque est alors lue sur la règle graduée. Une culture est diluée si le disque de Secchi reste visible au delà de 5-6 cm de profondeur; une valeur de 2-3 cm correspond à une culture prête à la production. Des valeurs inférieures à 2 cm indiquent qu’il est nécessaire de diluer la culture, ou de récolter fortement. En bonnes conditions, la quantité de spiruline présente dans une culture double tous les 2 à 4 jours, jusqu’à atteindre une concentration maximum (Secchi < 1.5 cm). Entre 1.5 cm et 3.5 cm, l’échelle des  » Secchi  » est grossièrement linéaire, avec 1.5 cm » 0.5 g/l (poids de spiruline sèche par litre de milieu) et 3 cm » 0.25 g/l.

4.2. Phase de croissance: obtention d’une pré-culture de 50 litres

Spiruline (1)Si l’on ne dispose que d’un petit échantillon de culture de spiruline (quelques cm3), prélever la moitié de cette quantité et la diluer dans ¼ litre de milieu de culture, par exemple dans une bouteille bien lavée de plastique transparent. Garder le reste de l’échantillon en réserve. La spiruline très diluée est fragile: éviter de l’exposer en pleine lumière, ou de l’agiter violemment. Placer la culture dans une situation claire mais sans lumière solaire directe; remuer doucement une fois par jour et attendre qu’elle devienne d’un vert très soutenu (Secchi < 3 cm). Suivant la quantité initiale de spiruline, cette première phase de croissance peut prendre 1-4 semaines. Procéder ensuite à des dilutions de la culture en doublant son volume par du milieu neuf, chaque fois qu’une densité de moins de 3 cm de Secchi est atteinte. En bonne conditions, ces dilutions successives devraient avoir lieu tous les 2 à 4 jours. On peut à ce moment placer la culture au soleil, à condition de veiller à ce que sa température ne dépasse jamais les 37-38°C; on procédera alors à au moins 3-4 agitations manuelles par jour. On pourra se servir de la pompe électrique pour l’agitation dès qu’un volume d’une trentaine de litres sera disponible (utiliser une bassine de plastique ou de tôle zinguée, ou encore une corbeille que l’on rendra étanche par une feuille de plastique). Dans un volume de moins de 50 litres, il convient de pincer le tuyau* de sortie de la pompe afin d’en réduire le débit: il s’agit d’obtenir un faible mouvement de l’ensemble du liquide. Continuer le processus de dilutions successives jusqu’à obtention de 50 litres de culture concentrée (Secchi < 2.5 cm).

* Ou agir sur la vanne de sortie dont sont équipées certaines pompes.

Remarquez que la valeur pH (= l’alcalinité) du liquide tend à augmenter lorsque la spiruline se développe (contrôler cette valeur au moyen du papier pH). D’environ 8.5 au départ (milieu neuf), le pH peut passer à 10 voire 11. Cette dernière valeur indique la nécessité de renouveler (ou diluer) le milieu de culture (voir ch. 6.)

4.3. Ensemencement du bassin au moyen des 50 litres de préculture

Afin d’éviter une trop forte dilution, on commencera par ensemencer un quart du bassin, soit une surface de 1 m2: on créera un mini-bassin temporaire en posant délicatement une petite poutre (ou de tout autre objet adéquat) en travers du bassin principal, à un mètre de l’un de ses petit coté. La surface de 1 m2 ainsi délimitée sera garnie d’une feuille de plastique de

1.5m x 1.5m. Attention à ne pas endommager la bâche de fond ! On préparera 100 litres de milieu neuf dans ce petit bassin, les 50 litres de culture y seront ensuite versés et on mettra en marche la pompe d’agitation. Lorsque cette culture sera concentrée (Secchi < 2 cm), on retirera la séparation temporaire (ainsi que le plastique du mini-bassin) et on ajoutera 250 litres de milieu neuf. Si la profondeur du liquide est un peu inférieure à 10 cm, on l’ajustera avec de l’eau. Lorsque la densité de spiruline sera à nouveau proche de 2-3 cm de Secchi, on ajoutera* 600 litres de milieu neuf : le bassin contiendra alors 1.000 litres de culture (25 cm de profondeur sur 4 m2 de surface).

*On peut ajouter l’eau nécessaire, puis l’ensemble des engrais correspondant, directement dans la spiruline. Bien remuer la culture (par ex. à l’aide d’un balais).

4.4 Résumé et séquence de la mise en place du module

  1. S’assurer de la disponibilité de l’ensemble des matériaux, des engrais et de l’emplacement nécessaire au module et à son fonctionnement
  2. Prendre contact avec Antenna Technologie ou avec un producteur de spiruline afin de commander un échantillon de spiruline vivante
  3. Dès la réception de la spiruline vivante, préparer quelques litres de milieu de culture (cf 3.1) et procéder à la multiplication de la spiruline (cf 4.2)
  1. Lorsque l’on dispose d’environ 50 litres de culture de spiruline bien concentrée, procéder à la construction du bassin couvert (cf 2.2)
  2. Une fois l’étanchéité du bassin testée, mettre en place le mini-bassin (cf 4.3). Tester l’étanchéité du mini-bassin (10 cm d’eau, quelques heures)
  3. Préparer 100 litres de milieu de culture et ensemencer le mini-bassin (cf 4.3)
  4. Lorsque la spiruline du mini-bassin est suffisement concentrée, retirer les éléments du mini-bassin et ajouter 250 litres de milieu de culture
  5. Après nouvelle concentration de la culture, ajouter 600 litres de milieu neuf.

5.Récolte

Lorsque la concentration de la culture passera au dessous d’un Secchi de 2-3 cm, on procédera à la récolte, de préférence le matin (surtout si l’on veut sécher la spiruline, mais notez toutefois qu’il est plus simple et préférable de la consommer directement, comme une pâte à tartiner ou un fromage frais).

5.1. Filtration

Spiruline (1)Assembler le matériel de récolte selon le schéma p.16. La pompe électrique sera posée sur un support afin d’éviter d’aspirer le fond du bassin (présence éventuelle de dépôts et de précipités). Ne pas oublier d’attacher un morceau de toile de moustiquaire doublé sur l’entrée de la pompe (préfiltration). Le débit de la pompe devra être réglé de manière à ce que le filtre ne soit pas sous pression, mais seulement alimenté en continu. Pour ce réglage, pincer le tuyau souple au moyen d’un serre-joint, ou augmenter la hauteur du filtre par rapport au niveau du bassin (ou agir sur la vanne de sortie, suivant le modèle de la pompe). La fermeture du filtre doit être soigneuse: replier deux fois extrémité du filtre sur lui-même avant d’y fixer la pince. Le liquide s’écoulant du filtre doit être pratiquement incolore. Après 15 à 20 minutes de filtration, stopper la pompe et laisser le contenu du filtre s’égoutter et se tasser 2-3 minutes; si le filtre n’est pas rempli au moins au ¾, enclencher à nouveau la pompe pour 15-20 minutes.

La toile de sérigraphie en polyester (éventuellement en Nylon), de maille comprise entre 30 et 60 microns, est idéale pour la réalisation du filtre. Prévoir un ourlet double et une couture serrée. D’autres tissus à mailles très serrées (spécialement la soie), sont utilisables quoique bien plus fragiles. Après usage, le filtre doit être lavé soigneusement, le plus vite possible, puis séché à l’abri du soleil direct.

5.2. Pressage

Lorsque le filtre égoutté est au moins ¾ plein, dévisser le serre-tuyau et retirer le filtre. Laisser en place la pince de fermeture et comprimer à la main la pâte de spiruline (en maintenant l’autre extrémité du filtre bien fermée) afin d’en extraire le plus de liquide possible. Ainsi pressée, la spiruline doit avoir la consistance d’un fromage frais.

Attention : dès ce moment, la spiruline doit être considérée comme du lait ou de la viande: respecter scrupuleusement les règles d’hygiène et les délais de conservation ! Si l’on ne veut pas la sécher, il faut la consommer dans l’heure qui suit la récolte (max. 2 jours au frigo; congélation possible).

Attention: pour être efficace, le pressage doit toujours suivre immédiatement la filtration!

Si l’on ne sèche pas la spiruline, on pèsera la pâte pressée et on divisera ce poids par quatre pour obtenir le poids de spiruline sèche. On peut à la rigueur mesurer la longueur du boudin de pâte dans le filtre lui-même (après pressage): chaque centimètre contient l’équivalent d’environ 4 g de spiruline sèche (pour un filtre de 4.5 cm de diamètre).

5.3. Extrusion, séchage (fig.3)

Le séchage est une bonne méthode de conservation de la spiruline à long terme (au moins une année, si conditionnement correct). Ce séchage doit être mené le plus rapidement possible (moins de 6 heures) mais, si l’on utilise un séchoir chauffé, on évitera de dépasser les 60°C pour ne pas détruire les vitamines et acides gras essentiels. Pour faciliter son séchage, la pâte de spiruline doit être extrudée sous forme de filaments (genre spaghettis). Pour de petites quantités, on y parvient en pressant la pâte à travers une grosse seringue. A partir de plus de 200 g de pâte de spiruline, on utilise un extrudeur spécial (voir schéma p.17). Au fur et à mesure de leur fabrication, ces  » spaghettis  » sont déposé sur un plateau grillagé, en une seule couche de préférence. Une fois garnis, les plateaux sont disposés dans une armoire ventilée et grillagée qui assure un séchage à l’abri de la lumière directe et des insectes. Les spaghettis sont secs lorsqu’ils se brisent facilement et peuvent se réduire en poudre; ils se détachent alors facilement des plateaux.

Une fois pressée, la pâte de spiruline contient environ 25% de matière sèche. Son poids se réduit donc d’environ ¾ au séchage.

5.4. Conditionnement

Une fois bien secs, les  » spaghettis  » de spiruline sont réunis sur une toile propre et grossièrement brisés à la main, à travers la toile. Les paillettes obtenues doivent être conservées au sec, à l’abri de l’air et de la lumière (par exemple dans des boîtes métalliques, des pots opaques, etc.) Dans ces conditions, les qualités nutritionnelles de la spiruline sont préservées pour au moins un an.

Par souci d’hygiène, ne jamais toucher la spiruline (surtout fraîche) avec les mains: porter des gants ou utiliser des ustensiles de cuisine propres.

Une fois sèche, la spiruline ne doit jamais être rehydratée (sauf pour consommation immédiate).

6.Maintenance de la culture

6.1. Apports d’engrais compensatoires

Après une récolte, il est indispensable de remplacer les éléments absorbés par la spiruline. On ajoute alors, proportionnellement à la récolte de spiruline, un mélange d’engrais agricoles.

Recette du mélange d’engrais:

  • 1.4 kg de nitrate de potassium
  • 50 g de phosphate monoammonique
  • 30 g de sulfate de potassium
  • 30 g de sulfate de magnésium
  • (10 g de chaux ou de plâtre, si l’eau manque de calcaire)

Mélanger très soigneusement ces produits (le mieux est de les broyer ensemble dans un mortier) et conserver ce mélange au sec. Après chaque récolte, peser la spiruline récoltée. (poids sec ou ¼ du poids de la pâte de spiruline après pressage). Pour chaque gramme de spiruline récoltée, apporter 1.5 g [env. 1 cuillère à café rase ] de mélange au bassin. Si l’on a seulement mesuré, après pressage, la longueur du boudin récolté (voir ch. 5.2), on ajoute 6 g [env. 1 cuillère à soupe rase ] de mélange par cm de boudin.

Dissoudre le mélange dans 2-3 litres d’eau, ajouter une pincée (env. 0.1 g) de sulfate de fer; dissoudre* puis verser dans le bassin.

* Ajouter ½ verre de thé vert rend le fer plus soluble (la couleur pourpre est normale)

6.2. Apports d’eau et contrôle de la température de la culture

Spiruline (3)Le niveau du bassin doit rester constant. Mesurer régulièrement sa profondeur et, le cas échéant, ajouter la quantité d’eau nécessaire. En climat très chaud, il peut être nécessaire de laisser le bassin ouvert, afin de faciliter une certaine évaporation et donc un refroidissement du liquide (rappel : 35-37°C est optimum, ne jamais laisser la culture dépasser 40°C !). Dans ce cas, protéger les ouvertures par une toile de moustiquaire.

On peut aussi ombrer le bassin aux heures les plus chaudes, par exemple en disposant un tissu ou des nattes sur la structure. Pour un ombrage de 50%, l’effet sur la productivité reste très faible, mais il croit rapidement au delà de cette valeur. Ombrage et ouvertures doivent être périodiquement ajustés en fonction de la température maximum de la culture aux heures les plus chaudes.

6.3. Purges

Afin d’éviter une lente détérioration du milieu de culture, ainsi que pour compenser le carbone absorbé par la spiruline, on procédera au renouvellement régulier d’une petite partie du liquide de culture. En période de bonne production, et suivant le pH mesuré, il peut être nécessaire d’éliminer plusieurs dizaines de litres de milieu par jour, que l’on remplacera par autant de milieu neuf (recette: table 1). On prélèvera le milieu à éliminer sur le liquide sortant du filtre lors de la récolte: on évite ainsi de perdre de la spiruline.

Contrôler quotidiennement la valeur pH de la culture au moyen d’une bandelette de papier- pH. En régime stable, cette valeur devrait se situer entre 10 et 10.5. Des valeurs plus élevées indiquent qu’il faut purger et remplacer plus de milieu de culture. Réciproquement, des valeurs pH < 10.5 permettent d’arrêter temporairement les purges (jusqu’à retours à pH> 10.5 ).

  • Bien que très pratique, cette méthode gaspille passablement d’engrais qui sont éliminés avec les purges; d’autres méthodes d’apport de carbone sont décrites dans l’ouvrage de J.-P. Jourdan.
  • Les milieux usés ne doivent pas être épandus directement sur les champs (trop forte salinité et pH). On pourra soit les diluer (dans min.5 volumes d’eau) et les épandre, soit les laisser évaporer en lagunage. Un recyclage des milieux usés peut être réalisé en les stockant dans un bassin profond (env. 1 m) au fond duquel on injecte continuellement de l’air par un petit compresseur d’aquarium. Le milieu ainsi traité peut être réincorporé à la culture après 15 à 20 jours.
  • Si on ne pousse pas la productivité du système (en récoltant moins de 6 g/m2 et par jour), et que l’on maintient une forte densité de culture (Secchi < 2.5), il n’est pratiquement pas nécessaire de purger. En effet, le gaz carbonique de l’air suffit alors aux besoins en carbone de la spiruline.

7.Résumé des opérations d’une journée de récolte (avec séchage)

  • Mesure de la concentration du bassin (Secchi), de son pH et de sa profondeur
  • Filtration d’environ 200 – 300 litres (si Secchi < 3)
  • Elimination d’une partie du liquide filtré (= purge, si pH > 10.5)
  • Pressage de la spiruline, pesée puis *extrusion de la pâte sur les plateaux du séchoir,
  • *début du séchage
  • Préparation et addition du milieu neuf (quantité équivalente à la purge)
  • Pesée (proportionnelle à la récolte) et addition des sels compensatoires et de l’eau nécessaire au maintien du niveau.
  • Nettoyage du matériel
  • Contrôle de la température en début d’après-midi (aération ou ombrage si besoin)
  • Fin du séchage: récupération et broyage grossier des  » spaghettis « , pesée et conditionnement.

8.Contrôle de qualité

8.1. Qualités apparentes

La pâte de spiruline fraîche doit être d’un vert très sombre, pratiquement sans odeur et sans goût. Une teinte bleue-rougeâtre indique un pressage trop violent, ou une durée de conservation dépassée (dans ce dernier cas, odeur d’œuf pourri).

Une spiruline sèche de bonne qualité doit être d’un vert très sombre, d’une odeur caractéristique (algue/champignon) peu prononcée et d’un goût faible. Une teinte bleu turquoise indique une forte exposition à la lumière (sans danger, mais qualité nutritionnelle fortement diminuée).

8.2. Mini tests de qualité

Lorsque l’on laisse séjourner quelques minutes à quelques heures une pincée de spiruline en poudre dans un verre d’eau, une coloration d’un bleu intense se développe. Il s’agit d’une protéine majeure chez la spiruline: la phycocyanine. L’absence d’une telle coloration indique un mauvais séchage (trop chaud), ou, pour un échantillon commercial, une fraude. Une coloration immédiate peut indiquer un pressage trop violent ou une dégradation du produit avant/pendant le séchage (trop lent)

9.Arrêt temporaire : conservation d’une culture sans production

Pour garder une culture « en veilleuse « , on ramènera, si il y a lieu, sa concentration à une densité moyenne (Secchi environ 3 cm) par récolte. Le pH devra être inférieur à 10.5 (purger si nécessaire). Enfin, on ombrera fortement le bassin de culture (en disposant une toile blanche, des nattes, des palmes, etc. sur la couverture plastique). Pas d’obscurité totale !

En cas de très fortes chaleurs, laisser des ouvertures protégées par de la moustiquaire. Il faudra alors apporter de l’eau de temps à autre (vérifier le niveau).

11.Notes

  • N’oubliez pas de toujours conserver une petite quantité de culture (quelques litres) en guise de sécurité, à l’abri, sans trop de lumière et avec une agitation occasionnelle (ou mieux: agitation par bulles, avec petit compresseur pour aquarium).
  • Retirer régulièrement tout corps étranger (insectes, débris végétaux…) du bassin, au moyen d’une passoire; profiter de cet entretien pour remuer manuellement les angles du bassin (régions les moins agitées par la pompe).
  • Une culture ayant subit un accident de température (surchauffe) peut être récupérée en la mettant en  » veilleuse  » (ch. 9), après une purge importante. Si la culture surchauffée change de couleur (vire au brun) avec éventuellement formation de mousse et dégagement d’odeurs d’oeuf pourri, filtrer autant que possible, laver la spiruline récoltée dans le filtre même, avec du milieu neuf et resuspendre immédiatement cette spiruline dans du milieu neuf (quantité nécessaire pour obtenir un Secchi de 4-5 cm). Mettre en veilleuse quelques jours. Commencer sans délais à augmenter le volume de votre culture de secours, afin de repartir le plus vite possible si votre bassin principal s’avérait irrécupérable. Dans ce dernier cas, il est nécessaire de vider et de nettoyer le bassin, puis de reprendre la procédure d’ensemencement décrite au ch 4.

tableau spiruline

12.Schémas

bassin couvert

materiel de récolte

sechage

Source : J.Falquet. Antenna Technologie

A propos de l'auteur :

La Fédération Française D'Aquaponie a pour but de fédérer et de coordonner le déploiement de l'aquaponie en France via des micro-fermes pilotes et la création d'éco-lieux de rencontres. Rejoignez l'aventure en adhérant à la FFDA.

4 commentaires sur “Produire de la spiruline en aquaponie ?

  1. Reste à savoir où acheter la souche de la spiruline pour commencer à la cultiver et la multiplier.
    J’ai cherché un peu sur le net et ça a l’air cher. Des liens ou bons plans?

  2. Super l’Article ; un bon résumé du manuel de Jean Paul Jourdan et de Antenna Technologie.
    Je propose de la souche de spiruline (45€ 1/2 litre) et des fertilisants prés pesé si cela vous intéresse ; voir spirulinasolutions.fr
    Je suis auteur d’un livre écris à la main qui à une approche didactique de la culture ; à voir sur le même site.
    Je propose de temps en temps des formations sur la culture domestique de spiruline ; je peux vous tenir informé si cela vous intéresse.
    En tous les cas merci pour votre article qui va permettre à ce que la spiruline soit plus accessible à tous .
    « Cordialguement »
    Gilles Planchon

  3. J’ ai construit un bassin de 60m^2 env. Quel volume d’inoculum? Comment je procede pour l’ensemencer?et quelle est la duree de peremption de l’inoculum? (J’habite au sud algerien)
    Mr planchon merci prealablement d’avoir repondre a mes question

  4. Bonjour,
    je suis NDOULOU Gloire I. Je compte entreprendre dans le métier de spiruline dans mon pays le COngo Brazzaville. Je suis confrontée à plusieurs difficultés dans la maîtrise de la culture. Et plusieurs questions hélas m’empêche d’avancer n’ayant pas les réponse s à celles ci. Alors je sollicite très respectueuse de l’aide de la part des anciens dans le domaine.
    Ma première préoccupation concerne l’approvisionnement en engrais et le coût de ceux ci
    La seconde porte sur la quantité de souche de spiruline paracas pouvant ensemencé un bassin de 3000 litres et prix.
    Quel est le matériel de labo à utilisé à quel coût et lieux d’approvisionnement.
    Merci

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