Interview Lucille Bonnet, fondatrice de la ferme L’autre Campagne

AquaponieFrance :  Bonjour Lucille. Je suis très heureux de t’accueillir aujourd’hui sur notre site AquaponieFrance.com pour cette interview. Pourrais-tu commencer par te présenter et présenter ton activité aquaponique à nos lecteurs ?

Lucille : Bonjour, merci Pierre.
Alors, je m’appelle Lucille Bonnet, j’ai 27 ans et le début de l’histoire vient du fait que je suis paysagiste DPLG (Diplômée Par Le Gouvernement) et c’est comme ça que j’ai été initié à la botanique. J’ai développé une spécialité sur les paysages productifs et beaucoup étudié les différentes manières productives dans le monde entier. Côté botanique, je me suis spécialisée dans les plantes originales comestibles par exemple les plantes ornementales qui sont en fait aussi comestibles ou les plantes aromatiques sauvages.
J’ai collectionné des plantes aromatiques rares que j’ai ramené de plusieurs pays différents. Toutes ont des besoins culturaux très particuliers (de part leurs origines très diverses) et il était très difficile de s’en occuper toutes correctement. De plus, à ce moment là, je vivais en ville à Marseille, avec seulement un mur comme espace libre.
Je me suis donc mise à expérimenter la culture hors-sol écologique que j’avais vu dans d’autres pays. Ces méthodes semblaient être avantageuses concernant la possibilité d’avoir une nutrition précise des plantes.
C’est comme àa que l’aventure de l’hydroponie et de l’aquaponie a commencé.
Maintenant, nous cultivons une centaines de variétés différentes de plantes aromatiques rares et sauvages en hydroponie et en aquaponie pour les chefs de restaurants gastronomiques de la région Pays-Basque.
Malgré des méthodes de culture très innovantes pour la France, nous gérons notre activité de production de manière très écologique et permaculturelle avec par exemple des enrichissements organiques ou l’alimentation des nos poissons faits maison.

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Crédit photo : lautrecampagne.com

AquaponieFrance :  Qu’est-ce qui t’as motivé à développer ce système de culture ?

Lucille : Ce qui m’a motivé dans ce système de culture ce sont les résultats. Je n’ai jamais vu mes plantes aromatiques aussi belles et savoureuses que depuis qu’elles sont dans l’eau ! La nutrition des plantes peut se faire de manière beaucoup plus homogène et contrôlée que dans le terre, et on voit nettement la différence à la récolte.
Dans ma réflexion pour me lancer dans ce métier, l’idée de participer à la diversification des plantes cultivées aujourd’hui était très importante pour moi. Et ce sont ces techniques de culture qui m’ont permis de cultiver la plupart de ma collection d’aromatiques, une palette végétale vraiment large qui n’aurait pas été possible en terre, surtout chez moi où nous avons de l’argile pure et dure.
Et puis, pour avoir vécue en ville, j’ai vu et je sens l’évolution très rapide de l’agriculture urbaine. Si en s’installant, on peut prouver que c’est une solution pour demain et participer à cette mouvance, on en est très heureux !

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Crédit photo : lautrecampagne.com

AquaponieFrance :  Selon toi, quels sont les avantages de l’aquaponie par rapport à un mode de culture plus traditionnel ? Toi qui pratique l’hydroponie, que constates-tu comme différences? Tu penses que l’aquaponie est plus rentable que l’hydroponie ou c’est un mythe?

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Crédit photo : lautrecampagne.com

Lucille : On commence à les connaître : l’économie d’eau grâce au principe de circuit fermé, l’ergonomie du travail à hauteur, l’économie des engrais (minéraux ou organiques), l’absence de pollution des nappes phréatiques ou du sol par rejet d’un excès d’engrais, la possibilité de produire sur de nouveaux territoires (stériles, urbains, désertiques…), l’inutilité d’avoir recours à des herbicides, pesticides, entre autres…
Par contre, je pense qu’il faut arrêter d’opposer systématiquement hydroponie et aquaponie. Il y a autant d’agricultures que d’agriculteurs et on peut faire une très bonne (ou mauvaise) production en hydroponie et/ ou en aquaponie.
Il ne faut pas toujours focaliser sur le résultat de la production, c’est surtout une histoire de feeling. Certains se sentiront plus à l’aise avec une méthode plutôt que l’autre. Moi, je pense que c’est ça le principal, on travaille tout les jours dans notre serre, il faut être en adéquation et convaincus de la méthode de culture que l’on a choisie.
La rentabilité n’a pas à voir directement avec le mode de culture mais c’est quelque chose à calculer dans son ensemble, depuis ses investissements au choix de son business model, en passant par le choix des plantes et/ou poissons qui seront cultivés et élevés, les clients et le mode de commercialisation. C’est un ensemble complexe mais qui se réfléchit dans sa globalité. Je ne pense pas que l’on puisse parler de rentabilité autrement.
La vraie différence entre l’hydroponie et l’aquaponie c’est le temps de démarrage des plantes. Un système aquaponique demande un temps de cyclage, un autre temps d’accumulation et d’enrichissement de l’eau. Après, si l’on pratique une hydroponie « bio », comme nous, avec un enrichissement organique de l’eau (avec des purins végétaux, du thé de lombricompost), la qualité et l’assimilation des nutriments par les plantes sont assez similaires à ce qu’on retrouve en aquaponie.

AquaponieFrance :  Selon toi, quelles sont les limites éventuelles de l’aquaponie face à l’hydroponie?

Lucille : La patience ! Il faut l’avouer, et comme je disais, un système aquaponique est plus long à s’installer, à se stabiliser et à s’enrichir. Pour produire vraiment tout ce que l’on veut, il faut attendre un certain moment. Par rapport à un projet commercial, je pense que c’est vraiment la seule et vraie limite qui pose problème par rapport au temps entrepreneurial qui est plus dans l’urgence.

AquaponieFrance :  Sans entrer dans des détails trop précis, pourquoi as-tu choisi de coupler aquaponie et hydroponie?

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Crédit photo : lautrecampagne.com

Lucille : Je pratique l’hydroponie et l’aquaponie ensemble, c’est un choix.
Je veux ce qu’il y a de mieux pour mes plantes, et j’ai remarqué que certaines sont plus prolifiques en aquaponie et d’autres en hydroponie. Alors, j’ai conservé les deux modes de culture et ça me passionne vraiment autant l’un que l’autre.
Et je pense aussi, par expérience, que ces deux modes de culture ont un bel avenir devant eux avec des projets de plus en plus souvent urbains. C’est important pour nous de continuer l’expérimentation en simultanée de l’hydroponie et de l’aquaponie pour pouvoir accompagner les porteurs de projet quel que soit leur orientation de culture.

 

AquaponieFrance :  Pourrais-tu parler de tes formations à nos lecteurs qui souhaiteraient éventuellement se former chez toi?

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Crédit photo : Marion Sarlé, Les Sourciers

Lucille : Alors chez nous, nous formons à l’hydroponie et à l’aquaponie.
Nos formations se décomposent en deux niveaux :

  1. L’initiation permet à tout le monde de découvrir ce mode de culture très efficace. Nous verrons ensemble les bases à travers des cours théoriques, puis nous vous ferons pratiquer cette discipline au sein de notre ferme.
  2. La formation niveau “expert” (ou créer sa ferme hydroponique ou aquaponique) est dédiée aux porteurs de projet désirant se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Nous vous formerons pour créer votre propre entreprise, et nous verrons ensemble toute l’élaboration d’un projet professionnel, de l’idée à la vente des produits.

Pour en savoir plus : http://www.lautrecampagne.com/formations-et-ateliers/

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Crédit photo : lautrecampagne.com

Au delà des formations à l’hydroponie et à l’aquaponie, ça nous tient à coeur que notre serre soit un endroit convivial de partage et d’échanges de connaissances autour de l’agriculture responsable et de l’alimentation au sens large du terme.
Nous proposons donc aussi, grâce à la participation et aux compétences d’intervenants extérieurs, des ateliers thématiques variés durant une demi-journée. Par exemple, on retrouvera des ateliers sur la cueillette sauvage et comment cuisiner les herbes ramassées, comment créer un lombricompost, comment jardiner de manière responsable et raisonnée, la cuisine détox et anti-allergène, les lactofermentations, le greffage des arbres fruitiers, etc, etc.
On est vraiment contents de pouvoir proposer ce genre d’ateliers pluridisciplinaires, les programmes sont riches. Je vous invite d’ailleurs vivement à aller jeter un oeil là dessus, ça vaut le coup pour les passionnés de jardinage et/ou de cuisine : http://www.lautrecampagne.com/ateliers/

AquaponieFrance :  J’ai vu que tu distribuais tes produits en vente directe, pourrais-tu nous expliquer ta démarche et nous faire part de tes retours clients?

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Crédit photo : lautrecampagne.com

Lucille : La distribution en circuit court me semble logique maintenant, on retourne vers ça de plus en plus, les gens ont envie de retrouver ce contact. Et puis, vendre des aromatiques très particulières demande forcément un service client pour expliquer et guider les gens sur l’utilisation et les atouts ( par exemple médicinaux) de ces plantes.
On a de très bons retours clients : on sent qu’ils ont envie de changer, d’améliorer et de diversifier leur alimentation sans savoir vraiment vers où se tourner. C’est donc très enrichissant d’être en face d’eux et de comprendre ce qu’ils recherchent.

AquaponieFrance :  Souhaiterais-tu ajouter quelque chose ?

Lucille : C’est difficile de parler de l’ensemble de nos activités parce que nous sommes une équipe très pluridisciplinaire, alors simplement, nous vous invitons à suivre notre actualité sur notre page Facebook où sur notre site internet : http://www.lautrecampagne.com/

AquaponieFrance :  Très bien Lucille, c’est vraiment génial ce que tu as entrepris. Vivement que d’autres personnes suivent ton exemple et permettent eux aussi de développer l’aquaponie en France et en Europe. Je te remercie pour ton temps et pour cette superbe interview.

J’invite les lecteurs du site à aller plus loin en visitant ton site très complet.

Vous êtes vous aussi aquaponiste ou porteur d’un projet aquaponique et vous souhaitez voir votre interview sur notre site? Contactez-nous.

A propos de l'auteur :

Passionné d'aquaponie et de permaculture, j'apporte ma petite pierre à l'édifice en menant diverses activités de promoteur de l'aquaponie en France.

3 commentaires sur “Interview Lucille Bonnet, fondatrice de la ferme L’autre Campagne

  1. Véritable culture respectueuse l’aquaponie a le mérite de responsabiliser les enfants et de leur faire comprendre la notion d’écosystème. C’est génial pour un futur plus responsable. Il faut en finir avec les dégâts de Descartes qui a réussit à enfoncer dans l’inconscient collectif que la nature était au service de l’homme ( sacré con celui la). L’homme fait parti d’un tout est n’est pas sacré au point de croire que tout tourne autour de lui…

    • Au fait, merci Lucille, c’est bon de voir des personnes qui ont des convictions, surtout quand il s’agit de démarches positives.

  2. Merci pour ces témoignages, je débute aussi en aquaponie et je me reconnais dans vos débuts, donc c’est encourageant!!

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